[rp] Arrivée d'Emery, fils en colère

Le jeune étalon engloutit la route dans un trot pressé, ses sabots martelaient le chemin en terre battue qui en atténuait le bruit, exténué, il expulse l'air par ses narines. Sur son dos, un jeune garçon blond, d'une dizaine d'années, en larmes et, accessoirement, fou de rage qui avait quitté St-Aignan la veille, laissant derrière lui une Marianne dépitée et ne sachant plus quoi inventer pour le retenir. Aucune excuse, aucune promesse, aucun rien n'aurait pu retenir la rage que l'enfant ressentait à cet instant. Dans sa main droite refermée sur les rennes, tout comme la main gauche d'ailleurs, un bout de tissu auquel il n'avait jamais prêté attention jusque là. Seul changement, il avait amélioré son savoir lors de sa retraite forcée dans un monastère de la région, il avait appris à lire convenablement surtout. Et à son retour, voulant rencontrer Izidore dans sa masure de SA, il avait trouvé son bureau vide, et sur celui-ci une lettre de Marianne, grossière erreur que de prendre le gamin pour un abruti. Sans compter, le blason! Le blason, mais quel idiot il avait été de les croire. Cette fois, il ne fuirait pas. S'il avait été trop petit autre fois, il était maintenant un presque adolescent, et bien que le Chevalier lui ait déjà infligé une correction lors d'un entrainement, il se voulait prêt à l'affronter cette fois. Il se retournait pour être sûr que Marianne ne le suivrait pas, comme si la Dame ne savait pas comment se rendre au dit endroit. Personne, juste le cheval, les aurores, la fatigue, son épée de bois, sa colère et lui. Dans le lointain, il voyait pointer le chateau Teutonique quasiment en simultané au soleil levant. Encore un effort et il y serait, face à ce dragon qu'il ferait passer de vie à trepas, tel un vrai chevalier qu'il se vantait de devenir un jour.

Il accélère l'allure en donnant un coup de rennes sur le flanc de la bête, depuis quand a-t-il appris à monter à cheval d'ailleurs? Sans importance. L'animal arrive devant les portes de l'édifice, le gamin tire un grand coup sur les lanières de cuire, un peu trop fort à en croire la façon que le cheval avait eu de se cambrer. Emery, ou Esteban Alejandro, d'après les dernières révélations en date, bascule en arrière pour atterrir sur les parties molles de son anatomie, ses fesses quoi. La douleur pourrait être insoutenable, d'ailleurs elle l'était, il s'était relevé pourtant, ne perdant pas son objectif de vue, pendant que l'étalon, lui, s'abreuvait dans une flaque d'eau. Il s'avance vers la grande porte et commence à tambouriner de toutes ses forces, à l'aide de ses poings et de ses pieds tout en hurlant de toutes ses forces à l'intention de qui pourrait l'entendre:

OUVREZ! OUVREZ je vous dis! Je sais que vous êtes là! Sortez si vous êtes un Chevalier!

Stoppant quelques secondes son tambourinage, il avait retiré son épée de bois de son dos pour la brandir de sa main droite et recommencer à cogner de la gauche:

Ouvre cette porte te dis-je!

Emery avait levé la tête vers le trou duquel provenait la voix, il pouvait distinguer maintenant, mieux que la voix, un nez qui ressemblait beaucoup à celui d'un humain, en beaucoup moins beau. Il commençait tout doucement à s'impatienter, et sa colère à s'éteindre à force de palabres pour obtenir ses entrées dans l'antre de la bêeeeeete.

Je ne suis pas petit! Je suis déjà grand et pas un asticot en pluss! Et j'ai une épée de bois parce que Malou elle a dit que j'avais pas encore le droit d'avoir une vrai, c'est pour ça. Marianne c'est Malou! C'est l'écuyer du méchant chevalier Izidore!

Après voir prononcé ce nom, il avait donné un dernier coup de poing à la porte.

J'veux voir le Chevalier Izidore! Vous z'avez qu'à lui dire que...

Soudain, une idée lui vint, il avait coincé son épée entre ses jambes pour se libérer les mains et déplier le bout de tissu qu'il avait dans sa main et lire le nom qui y était inscrit:

Esteban Alejandro l'attend devant la porte! Il m'attend!

Il avait cru que la porte et le monstre derrière avaient fini par céder, il avait amené sa main pour récupérer son épée calée entre ses jambes pour se redresser, lorsqu'il aperçu devant lui, "le Géant vert". Ou plutôt le haut de ses jambes. Sa tête blonde s'était lèvée, suivant des yeux le gardien, jusqu'à son extrémité la plus chauve, la tête. Sa mâchoire, pendante, ne pouvait cacher la surprise et la frayeur que le gamin venait de se voir offrir. Surtout lorsqu'il avait repéré le couteau ensanglanté que la créature avait, heureusement, fini par ranger à sa ceinture. Tout à fait entre nous, Otto aurait pu lui dire n'importe quoi, l'épouvante avait été telle qu'il n'aurait pas été en mesure d'émettre la plus petite des objections.

"Laisse-moi rire ... asticot..."

S'il avait été, à un moment ou l'autre, en colère, nous pourrons facilement admettre, que le sentiment dominant était désormais l'inquiétude qui lui inspirait le gardien. Bien forcé, Emery avait rapidement revu ses ambitions et son impertinence à la baisse. Il avait reculé de deux pas, pour une question de confort avant tout, la tête levée si longtemps ça fait mal à la nuque à force. D'ailleurs, il sentait bien qu'il ne le laisserait pas passer s'il persistait sur la voie de la confrontation, il s'était résolu à jouer saisir la perche qui lui avait été gentiment tendue.

Bien sur que le Chevalier Izidore il m'attend! Pourquoi je serais là à crier son nom sinon? Mais vous pouvez lui demander si vous voulez! Dites je peux entrer? ... S'il vous plait. Il avait rangé son épée dans son dos et posé ses mains sur sa nuque pour se donner un air décontracté. C'est quoi un Autru-chien? C'est une sorte de Chevalier aussi?